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D'Algérie - Djezaïr
Mouvement de réconciliation

Proposer une devise

"Il faut mettre ses principes dans les grandes choses, aux petites la miséricorde suffit." Albert Camus// "La vérité jaillira de l'apparente injustice." Albert Camus - la peste// "J'appelle à des Andalousies toujours recommencées, dont nous portons en nous à la fois les décombres amoncelés et l'intarissable espérance." Jacques Berque// « Mais quand on parle au peuple dans sa langue, il ouvre grand les oreilles. On parle de l'arabe, on parle du français, mais on oublie l'essentiel, ce qu'on appelle le berbère. Terme faux, venimeux même qui vient du mot 'barbare'. Pourquoi ne pas appeler les choses par leur nom? ne pas parler du 'Tamazirt', la langue, et d''Amazir', ce mot qui représente à la fois le lopin de terre, le pays et l'homme libre ? » Kateb Yacine// "le français est notre butin de guerre" Kateb Yacine.// "Primum non nocere" (d'abord ne pas nuire) Serment d'Hippocrate// " Rerum cognoscere causas" (heureux celui qui peut pénétrer le fond des choses) Virgile.// "Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde" Albert Camus.

D'Algérie-Djezaïr

Le MOUVEMENT D’Algérie-Djezaïr vient d’être officialisé par plus d’une centaine de membres fondateurs résidant dans le monde entier, ce 22 juin 2008 à Saint Denis (Paris - France). Il est ouvert à toutes celles et ceux qui voudront le rejoindre, natifs d'Algérie, et leurs descendants.

ORGANISATION

Elle est démocratique, c'est-à-dire horizontale, sans centralisme, et sans direction. Les décisions essentielles doivent être conformes à l’esprit du Texte Fondateur. Elles sont prises après larges consultations, où tous les membres donnent leurs opinions. Les règles internes sont arrêtées par les "adhérents". Pas de cotisations. Les groupes et le Mouvement trouvent les moyens de faire aboutir leurs actions.

2012 : année du cinquantenaire. Ceci pouvant expliquer cela!

Eclaircissements de l'historien Guy Pervillé sur http://guy.perville.free.fr

A propos de mon texte censuré : 1962, fin de la guerre d’Algérie (2012)
lundi 23 janvier 2012. 

(rubrique "mises au point")

Deux semaines après avoir publié sur ce site le texte censuré de mon article écrit pour les Commémorations nationales 2012, je dois remercier tous ceux qui m’ont manifesté leur soutien, et tout particulièrement ceux qui m’ont aidé à lui donner un plus grand retentissement, notamment François Delpla, pour le grand article qu’il lui a consacré sur son site personnel [1], et sur son blog sur Mediapart [2], mais surtout Pierre Assouline, pour son blog du Monde.fr. [3], et enfin Sébastien Le Fol pour son blog du Figaro.fr [4]. Grâce à eux, le taux de fréquentation de mon site - ou plutôt de ce texte sur mon site - a explosé : plus de 3100 visites en quinze jours (la grande majorité dans les deux ou trois derniers jours), et leur nombre ne cesse d’augmenter d’heure en heure.

Une précision nécessaire

Je dois néanmoins rectifier une légère inexactitude des principaux comptes rendus cités. En effet, les deux principaux responsables de la publication des Commémorations nationales 2012, engagés envers moi par leur acceptation préalable de mon texte, m’ont adressé leurs excuses juste à temps pour que je n’aie pas la mauvaise surprise de découvrir par moi-même ce qui en avait été fait. Etant donné ce qu’avaient été nos relations, j’ai accepté ces excuses, et compris que la décision en question avait été prise au-dessus d’eux. Mais pour ne pas les embarrasser davantage, je n’ai pas essayé de leur en demander plus. Au contraire, j’ai suspendu ma réaction jusqu’au moment où je pourrais constater par moi-même la réalité de ce cas de censure. Ce fut fait le samedi 7 janvier 2012, quand je vis les textes publiés sur le site Internet des Archives de France. Le mien était bien devenu tel que j’en avais été informé. Ainsi, la courtoisie de mes interlocuteurs, que nul ne pourrait leur reprocher, a eu pour utilité de m’aider à surmonter l’indignation que méritait assurément un acte de censure aussi stupide que scandaleux.

Voici ce qui a été publié dans le recueil des Commémorations nationales 2012, www.archivesdefrance.culture.gouv.fr/...nationales/...2012/.../fin-de-la-guerre-d-algerie/ D’abord, à la page 56 :

« La guerre d’Algérie se termine en 1962 avec l’indépendance du pays revendiquée depuis le 1er novembre 1954 par le Front de libération nationale (FLN). La fin de cette guerre impliquait trois conditions généralement confondues, mais qui sont restées distinctes : la fin des hostilités entre le FLN et la France ; la reconnaissance d’un État algérien par la France ; la formation d’un gouvernement algérien incarnant cet État.

Les accords d’Évian sont signés le 18 mars 1962 par les représentants du gouvernement français et du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA). Ils sont approuvés à une large majorité (64,8 % des inscrits et 90,6 % des suffrages exprimés) lors d’un référendum organisé le 8 avril 1962 en métropole. Le 13 avril, l’Exécutif provisoire franco-algérien, présidé par Abderrahmane Farès, s’installe à Rocher-Noir. Un second référendum en Algérie, le 1er juillet, se traduit par une ratification massive des accords d’Évian (91,23 % des inscrits et 99,72 % des suffrages exprimés).

Le 3 juillet, la France reconnaît l’indépendance de l’Algérie sous l’autorité de l’Exécutif provisoire. Une Assemblée constituante élue en septembre 1962 reçoit les pouvoirs de l’Exécutif provisoire et du GPRA et investit le 26 septembre un gouvernement présidé par Ahmed Ben Bella.

Pendant cette période, les violences meurtrières se poursuivent et frappent toutes les communautés : Européens et musulmans, civils et militaires. »

Les vingt premières lignes de ce texte sont des emprunts à ce que j’avais écrit, sans mention de leur origine (mais cela valait mieux). Ils correspondent à ce qui a été jugé publiable. Quant à la dernière phrase, c’est une bouillie informe qui prétend résumer tout ce qui a été coupé, et dont je ne revendique rien.

D’autre part, la bibliographie complémentaire pour aider les lecteurs à en savoir plus a été heureusement maintenue à la p. 281 :

« FIN DE LA GUERRE D’ALGERIE
Vers la paix en Algérie. Les négociations d’Evian dans les archives diplomatiques françaises, 15 janvier 1961-29 juin 1962. Bruxelles, Bruylant, 2003 (fac simile du texte authentique des accords, pp. 381-473).
Jean Monneret, La phase finale de la guerre d’Algérie, Paris, L’Harmattan, 2001.
Guy Pervillé, Pour une histoire de la guerre d’Algérie, Paris, Picard, 2002 (voir les pp. 206-230).
Et sur le site http://guy.perville.free.fr , voir notamment :
« Les accords d’Evian et les relations franco-algériennes » (1988) ;
« Trente ans après : réflexions sur les accords d’Evian » (1992)
« Les conditions du départ d’Algérie » (1995)
« Quand la guerre d’Algérie a-t-elle pris fin ? » (1999)
« Connaître les accords d’Evian : les textes, les interprétations et les conséquences » (2003) »

Là, encore, je ne me plains pas, bien au contraire, même si j’aurais préféré voir ma signature maintenue ici.

Mais pourquoi cet acte de censure ?

Après avoir constaté cet acte de censure, j’ai commencé à me demander qui avait pu le décider et pour quelles raisons, dans quelle intention. Et il ne m’a pas fallu plus d’un quart d’heure de recherche sur Google pour trouver une première piste digne d’intérêt.

Une première piste...

En effet, dans le journal algérien L’Expression-Le Quotidien, en date du 5 janvier 2012, se trouve un article intitulé : « COMMÉMORATION DU 50e ANNIVERSAIRE DE LA FIN DE LA GUERRE D’ALGÉRIE. Sarkozy désigne Hubert Colin de Verdière. »  [5].

Selon son auteur, Adel Mehdi, « A Alger, cette nomination a été perçue comme étant un choix judicieux et un signe annonciateur d’un apaisement des relations. Alors que l’Algérie tarde à installer officiellement les célébrations du 50e anniversaire de l’Indépendance et à nommer un responsable unique pour encadrer cette manifestation qui est partagée entre l’ENTV, le ministère de la Culture et le ministère des Moudjahidine, le président français Nicolas Sarkozy a nommé dans la discrétion le 23 octobre dernier, Hubert Colin de Verdière, ex-ambassadeur en Algérie, comme le coordonnateur général de l’ensemble des initiatives qui marqueront en 2012, le 50e anniversaire de la fin de la Guerre d’Algérie. A Alger, cette nomination a été perçue comme étant un choix judicieux et un signe annonciateur d’un apaisement des relations entre les deux pays. M. de Verdière a été à deux reprises ambassadeur de France en Algérie. De ce fait, il garde ses réseaux et maîtrise parfaitement le dossier Algérie. Le diplomate, qui a été installé au Quai d’Orsay, aurait dans son équipe le patron de France Télévisions, Rémy Pflimlin. Ce dernier aurait même chargé Bertrand Mosca, actuel DG de France 2, de rencontrer des hauts responsables dans l’audiovisuel et le cinéma algériens pour tenter de faire une commémoration commune. L’information de la nomination du plus expérimenté diplomate français a été en tout cas confirmé par Marc Laffineur, le secrétaire d’État français aux Anciens combattants au journal La Croix, qui a même tendu la main au ministère des Moudjahidine en disant : « Je suis bien évidemment favorable à un échange dépassionné autour de la commémoration de la fin de la Guerre d’Algérie, en relation avec les associations d’anciens combattants, de part et d’autre de la Méditerranée. Un plus grand rapprochement entre les deux pays est souhaitable. La Guerre d’Algérie a été un immense gâchis. Il faut admettre qu’il est temps de tourner la page. Ce qui a été fait avec l’Allemagne, en termes de réconciliation, doit pouvoir être fait avec l’Algérie. »

Ainsi, tout s’éclairerait ! La publication de mon article dans une publication officielle de l’Etat poserait une question de conformité à la ligne suivie par le gouvernement français en matière de politique mémorielle ! Si c’était bien le cas, il aurait été plus convenable de me le dire au plus vite. Mais je doute que j’aurais été convaincu par cette nouvelle ligne, et ce pour plusieurs raisons. D’abord, elle était imprévisible, parce que la politique mémorielle du président Sarkozy, faite de multiples décisions improvisées, n’est pas plus cohérente que celle de son prédécesseur Jacques Chirac. Entre autres exemples particulièrement frappants, on pourrait citer la très récente publication du livre de Jean-Jacques Jordi, Un silence d’Etat. Les disparus civils européens de la guerre d’Algérie, Paris, Editions SOTECA, 2011, réalisé à la demande du délégué aux rapatriés, et grâce à de très larges dérogations aux délais légaux de consultation des archives, accordées par le Premier ministre [6]. Dès lors, comment aurais-je pu prévoir le sort qui allait être réservé à mon texte ? D’autre part, le secrétaire d’Etat cité plus haut ne dit pas si le gouvernement algérien a enfin renoncé à la demande de déclaration de repentance unilatérale de la France [7], quasi-officielle depuis 1995, explicitement formulée en 2005 et 2006, et que le candidat Sarkozy avait été le premier à refuser publiquement en 2007. On a vu à quoi conduisait logiquement cette revendication en janvier 2010, quand 125 députés algériens avaient déposé une proposition de loi tendant à mettre la France en accusation devant un tribunal algérien pour tous les crimes qu’elle a ou aurait commis en Algérie de 1830 à 1962. Le gouvernement algérien n’a pas donné suite à cette proposition, mais on aimerait savoir s’il l’a désavouée parce qu’il avait compris son incompatibilité avec les accords d’Evian (lesquelles reposaient tout entiers sur une amnistie générale réciproque de tous les crimes commis par les deux parties), ou si l’Algérie espère toujours (comme notre secrétaire d’Etat aux anciens combattants semble encore l’inviter à le faire) que la France reconnaîtra avoir été pour l’Algérie ce que l’Allemagne avait été pour elle-même. Aussi longtemps que cette clarification nécessaire n’aura pas été faite, on peut craindre que la politique mémorielle commune souhaitée par notre ancien ambassadeur en Algérie ne soit une fois de plus un leurre.

Une deuxième piste...

Je pensais donc avoir trouvé une bonne clé d’interprétation en découvrant ce texte, mais brusquement un autre texte a tout remis en question : l’interview du même secrétaire d’Etat aux anciens combattants, Marc Laffineur, dans le quotidien français La Croix le 5 décembre 2011 [8], reprise et commentée dans le quotidien en ligne algérien Free Algérie le 6 janvier 2012 sous le titre Marc Laffineur : « La guerre d’Algérie a été un immense gâchis »  [9]. Dans cette interview, le secrétaire d’Etat annonçait que « le président de la République vient de charger Hubert Colin de Verdière, ambassadeur en Algérie à deux reprises, de coordonner les actions liées en France à ce 50e anniversaire. » Mais il préconisait une attitude identique à celle que j’avais suivie en écrivant mon article censuré. Le journaliste algérien Sofiane Ayache croit trouver une contradiction fondamentale dans ses propos :

"Cette année commémorative doit être marquée non pas par la polémique et les divisions, mais par le rassemblement et le recueillement au nom de toutes les victimes", observe le secrétaire d’Etat français. Pour autant, la France ne compte pas battra sa coulpe selon le secrétaire d’Etat. Pas de pardon, ni de repentance à l’ordre du jour. La preuve ? "Toutes les dates permettant de se souvenir du courage, de l’engagement, et du sacrifice des forces françaises et supplétives seront commémorées. Il est normal que toutes les associations, qu’elles représentent les anciens combattants, les rapatriés ou les harkis, puissent organiser une cérémonie à la date de leur choix. La guerre d’Algérie a concerné toutes les familles françaises car les appelés ont été mobilisés". Il ajoute néanmoins : "La guerre d’Algérie a été un immense gâchis". Et "sa mémoire doit être apaisée".

D’une part le secrétaire d’Etat reconnaît que "la guerre d’Algérie a été un drame" et qu’il "faut avoir le courage de faire la lumière sur tous les aspects de ce conflit". D’autre part, il précise et justifie : "Les militaires français ont été, dans leur immense majorité, exemplaires dans l’exercice de leur devoir". Est-il possible de parler d’apaisement quand on glorifie ainsi les terribles exactions de l’armée française ? Assurément non. Marc Laffineur, comme tous les officiels français, a quelque mal avec la révolution algérienne.

Le secrétaire d’Etat favorable à "un échange dépassionné autour de la commémoration" précise que "la vérité ne doit pas être à sens unique, elle doit concerner tous les aspects, donc les errements de part et d’autre, et être souhaitée des deux côtés de la Méditerranée".

Cette contradiction que croit voir le journaliste algérien est-elle réelle ? En tout cas, je n’ai rien contre la position du secrétaire d’Etat, qui me semble correspondre aux exigences de la situation. Le gouvernement français ne pouvait pas sacrifier les attentes des différents groupes mémoriels français à une très hypothétique réconciliation avec l’Algérie passant par l’acceptation de sa revendication de repentance. Dans ces conditions, je ne comprends pas le sort qui a été réservé à mon texte, qui reflétait le même état d’esprit. Dois-je comprendre que la politique du gouvernement français aurait changé après le 5 décembre dernier, ou bien qu’il a deux politiques contradictoires, comme celles du président Jacques Chirac et de ses gouvernements entre 2002 et 2007 ?

Et une troisième piste...

Mais un troisième texte, daté du 16 janvier 2012 est venu répondre à mes interrogations : il s’agit d’un article de synthèse publié, après plusieurs autres, par le quotidien algérien en ligne Tout sur l’Algérie [10], intitulé Ne pas gêner la France et éviter de faire le bilan de 50 ans de gestion chaotique du pays. Cinquantenaire de l’indépendance de l’Algérie : la délicate position du pouvoir.

D’après cet article, l’attitude du gouvernement algérien n’est pas celle que je redoutais : « Contrairement au gouvernement français, qui vient de nommer l’ancien ambassadeur Hubert Colin de Verdière à la tête de la Commission de coordination en France des festivités du cinquantenaire de l’indépendance de l’Algérie, les autorités algériennes se font très discrètes sur les préparatifs de ce côté‑ci de la Méditerranée. Selon nos informations, il existe pourtant bien, côté algérien, une commission pour l’organisation du cinquantenaire. Elle est même dirigée par Ahmed Ouyahia en personne. Mais elle travaille dans la discrétion la plus totale. Une discrétion qui peut s’expliquer de deux façons.

D’une part, cette année du demi‑siècle de l’indépendance est aussi une "année bilan" pour le pouvoir en place depuis 1962. Une année qui commence sur fond de protestations sociales à Laghouat, Alger, Oran, Béjaia... comme autant d’illustrations de l’échec du système. Services publics défectueux, éducation délaissée, économie stagnante, culture absente... En cinquante ans, le pays a peu progressé.

D’autre part, la discrétion d’Alger est liée au contexte en France qui s’apprête à vivre deux élections : présidentielle et législative. Cette échéance électorale s’annonce difficile pour Nicolas Sarkozy et son parti, l’UMP. Pour Paris, ce contexte implique que les festivités du cinquantenaire se déroulent dans le plus grand calme. « Pas de vague », « contrôle des extrémistes au maximum »... c’est en substance le message délivré par Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères, puis par Jean‑François Copé, patron de l’UMP, lors de leurs visites en Algérie en 2011.

Dans ce contexte, le choix d’Ouyahia pour diriger la commission du cinquantenaire s’explique encore mieux. Le patron du RND, contrairement au FLN, se positionne contre le discours sur la repentance nécessaire de la France. Il l’a dit à plusieurs reprises à ses interlocuteurs français et ne rate aucune occasion pour rappeler sa position sur le dossier, comme sa réponse le 7 janvier aux Turcs qui s’insurgeaient contre l’adoption de la loi française pénalisant la négation du génocide des Arméniens.

Mais cette réponse aux Turcs est aussi un message en direction de la France. En Algérie également, 2012 est une année électorale et les Français devraient éviter de nouvelles provocations sur le thème de la mémoire pour ne pas gêner davantage le pouvoir algérien. Un message qui semble avoir été reçu à Paris. Trois jours après les déclarations d’Ouyahia, Alain Juppé, ministre français des Affaires étrangères, s’est exprimé mardi 10 janvier devant les députés de la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale pour appeler à la « modération » et réaffirmer son entente avec Abdelaziz Bouteflika pour que la célébration des cinquante ans de l’indépendance se fasse « dans un esprit de modération en essayant d’éviter les extrémismes de tous bords ». Le message d’Alain Juppé était donc destiné aux députés qui pourraient être tentés par des projets de loi du type de celle glorifiant le colonialisme. »

Ainsi, ma première interprétation était fausse : la politique mémorielle commune qui semble convenue entre les gouvernements français et algérien semble bien dirigée contre la revendication algérienne d’une repentance française, qui a encore de nombreux partisans. Cet accord mériterait d’être salué s’il n’avait pas intérêt à rester très discret. Mais je m’inquiète des conséquences que les ministres français croient (apparemment) devoir en tirer : « Eviter de nouvelles provocations sur le thème de la mémoire » (...) « Pas de vague », « contrôle des extrémistes au maximum » (...), Alain Juppé, ministre français des Affaires étrangères, s’est exprimé mardi 10 janvier devant les députés de la Commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale pour appeler à la « modération » et réaffirmer son entente avec Abdelaziz Bouteflika pour que la célébration des cinquante ans de l’indépendance se fasse « dans un esprit de modération en essayant d’éviter les extrémismes de tous bords ». Je comprends et j’admets cet objectif, mais je m’interroge sur les conséquences que le gouvernement a pu en tirer. Mon texte était-il celui d’un « extrémiste » ? Peut-on croire sérieusement que la censure du rappel de tous les événements douloureux qui ont suivi les accords d’Evian en Algérie durant l’année 1962 était un bon moyen d’assurer la sérénité de cette commémoration ? Bien au contraire, je crois que cette censure particulièrement voyante était le plus sûr moyen de provoquer une explosion de multiples indignations. Et c’est justement pour la prévenir et l’éviter autant que possible que j’avais été chargé de rédiger cet article, en rappelant des faits que nul ne doit ignorer, car seule la reconnaissance des réalités peut constituer une base solide pour une vraie réconciliation franco-algérienne. En effet, il ne peut pas y avoir de mémoire juste sans une vraie histoire.

Voilà ce que j’aurais pu dire si j’avais été consulté sur l’opportunité de publier mon article sur la fin de la guerre d’Algérie. Mais en fait, je ne sais rien de plus que ces quelques informations qui me donnent seulement un cadre général pour essayer d’interpréter cette censure de mon texte. Bien loin d’accuser telle ou telle personnalité, je reste dans l’impossibilité d’identifier le ou les responsables de la décision qui a été prise à son encontre. Encore une fois, je doute fort que la décision prise soit vraiment raisonnable... En tout cas, dans l’immédiat, sa principale victime est la publication des Commémorations nationales 2012, qui se trouve discréditée par l’absurde amputation de son article le plus sensible.

Guy Pervillé.

[1] Site www.delpla.org/article.php ?id_article=525

[2] http://blogs.mediapart.fr/blog/francois-delpla/190112/censure-au-ministere-de-la-culture

[3] http://passouline.blog.lemonde.fr/2012/01/20/les-celebrations-nationales-2012-inaugurees-par-une-polemique/

[4] blog.lefigaro.fr/...fol/2012/.../guerre-dalgerie-un-historien-denonce-une-censure.html

[5] http://www.lexpressiondz.com/actualite/145.

[6] Voir mon compte rendu détaillé de ce livre sur mon site http://guy.perville.free.fr, rubrique « Textes publiés » (2011).

[7] Voir la liste de la vingtaine de textes que j’ai publiés sur ce sujet depuis dix ans, à la fin de ma « Réponse à Yasmina Adi » (2010), sur mon site http://guy.perville.free.fr, rubrique « Mises au point » : Mes réponses aux questions de Guy Hennebelle (2002) ; Les historiens de la guerre d’Algérie et ses enjeux politiques en France (2003) ; La production de l’histoire de l’Algérie, en Algérie et en France, après la décolonisation (2003) ; La revendication algérienne de repentance unilatérale de la France (2004) ; La guerre d’Algérie cinquante ans après : le temps de la mémoire, de la justice, ou de l’histoire ? (2004) ; L’historiographie de la guerre d’Algérie, en France, entre mémoire et histoire (2004) ; La date commémorative de la guerre d’Algérie en France (2004) ; Les sciences historiques et la découverte tardive de la guerre d’Algérie : d’une mémoire conflictuelle à la réconciliation historiographique ? (2004) ; La ”première” et la “deuxième guerre d’Algérie” : similitudes et différences (2004) ; Réponse à Gilles Manceron (2005) ; Le 8 mai 1945 et sa mémoire en Algérie et en France (2005) ; L’histoire immédiate de la relation franco-algérienne : vers un traité d’amitié franco-algérien ? (2006) ; La confrontation mémoire-histoire en France depuis un an (2006) ; France-Algérie : groupes de pression et histoire (2006) ; Histoire et mémoire de la décolonisation en France et en Algérie : les causes de l’échec du traité d’amitié franco-algérien (2007) ; Ma position sur l’annexe au rapport d’Eric Savarese : "Une note sur le ’mur des disparus’" (2007) ; A propos de la pétition : "France-Algérie : dépassons le contentieux historique" (2007) ; Réponse à Catherine Coquery-Vidrovitch, Gilles Manceron et Gérard Noiriel, historiens et membres du Comité de vigilance face aux usages publics de l’histoire (2008) ; Préface au livre de Roger Vétillard, Sétif, mai 1945, massacres en Algérie, Editions de Paris (2008) ;Cinq livres récents sur le 8 mai 1945 en Algérie (2002-2009) (2009). Ainsi que mon livre Pour une histoire de la guerre d’Algérie, Paris, Picard, 2002, pp. 267-312.

[8] http://la-croix.com/Actualite/S-informer/France/Marc-Laffineur-la-memoire-de-la-guerre-d-Algerie-doit-etre- apaisee

[9] http:// :www.freealgerie.com/debat-du-jour/

[10] http://www.tsa-algerie.com/politique/cinquantenaire-de-l-independance-de-l-algerie-la-delicate-position-du-pouvoir_19015.html




NB : à la lecture des informations/ journaux communiquées ici par GP, il m'est venue une réflexion que je vous livre brut de pomme. C'est au sujet de la comparaison d'avec l'Allemagne dont la réconciliation est, au sujet de nos rapports passionnés et conflictuels avec l'Algérie, mise en exergue.
Effectivement, nous devrions - un jour viendra - parvenir à la même chose.
Mais la comparaison s'arrête là.
Car bien que 3 guerres terribles aient opposée la France à l'Allemagne (ou ce qu'elle n'était pas encore mais s'en rapprochait), guerres auxquelles des troupes conséquentes d'originaires des départements français d'Algérie, cette dernière ne s'est pas construite contre la France ou par la France, à contrario de l'Algérie moderne lui devant même son nom (décret de 1839). Disons que les rapports franco-algériens sont plus oedipiens.
D'autre part, cette réconciliation s'est construite dés l'immédiat après-guerre et l'Allemagne a porté haut, force de symboles à l'appui, sa part du contrat.
Pour ce qu'il en est de la France, si la colonisation dont l'apogée fut 1930 a été portée aux sommets, force est de constater que depuis 50 ans l'analyse critique de celle-ci a été systématiquement menée par les historiens, également par le champ politique, et la France assume sa part de responsabilités (insuffisamment à mon sens).
En ce qui concerne l'Algérie, celle-ci n'a cessé de prendre une posture radicale où elle ne remet nullement en cause ses erreurs et ses errements dont furent victimes les Harkis, massacrés pour fait de "francophilie", et les Pieds-Noirs victimes d'une authentique épuration ethnique dont les historiens Algériens les plus libres (c'est à dire hors d'Algérie!), ainsi que quelques écrivains affranchis, ont accepté de rendre compte allant à contre courant de la version officielle de la guerre de libération.
Donc, pour que l'exemple vis à vis de l'Allemagne soit pertinent, cela ne peut l'être que par ce travail de mémoire et d'Histoire, certes douloureux, par l'Algérie. Sinon, ce ne resteront que des rapports boiteux.
Ce n'est que mon humble avis.

EW

Wagner le 25.01.12 à 11:18 dans p/ cette histoire qui nous concerne. - Lu 1236 fois - Version imprimable
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