S'identifier - Contact

D'Algérie - Djezaïr
Mouvement de réconciliation

Proposer une devise

"Il faut mettre ses principes dans les grandes choses, aux petites la miséricorde suffit." Albert Camus// "La vérité jaillira de l'apparente injustice." Albert Camus - la peste// "J'appelle à des Andalousies toujours recommencées, dont nous portons en nous à la fois les décombres amoncelés et l'intarissable espérance." Jacques Berque// « Mais quand on parle au peuple dans sa langue, il ouvre grand les oreilles. On parle de l'arabe, on parle du français, mais on oublie l'essentiel, ce qu'on appelle le berbère. Terme faux, venimeux même qui vient du mot 'barbare'. Pourquoi ne pas appeler les choses par leur nom? ne pas parler du 'Tamazirt', la langue, et d''Amazir', ce mot qui représente à la fois le lopin de terre, le pays et l'homme libre ? » Kateb Yacine// "le français est notre butin de guerre" Kateb Yacine.// "Primum non nocere" (d'abord ne pas nuire) Serment d'Hippocrate// " Rerum cognoscere causas" (heureux celui qui peut pénétrer le fond des choses) Virgile.// "Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde" Albert Camus.

D'Algérie-Djezaïr

Le MOUVEMENT D’Algérie-Djezaïr vient d’être officialisé par plus d’une centaine de membres fondateurs résidant dans le monde entier, ce 22 juin 2008 à Saint Denis (Paris - France). Il est ouvert à toutes celles et ceux qui voudront le rejoindre, natifs d'Algérie, et leurs descendants.

ORGANISATION

Elle est démocratique, c'est-à-dire horizontale, sans centralisme, et sans direction. Les décisions essentielles doivent être conformes à l’esprit du Texte Fondateur. Elles sont prises après larges consultations, où tous les membres donnent leurs opinions. Les règles internes sont arrêtées par les "adhérents". Pas de cotisations. Les groupes et le Mouvement trouvent les moyens de faire aboutir leurs actions.

Journée des défunts. Discours de Danielle Pister, universitaire.

A nos morts laissés en terre algérienne...

...je prolongerais en ajoutant "et en terre d'exil".
Ce texte exprime un sentiment qui, s'il n'est pas partagé par tous, l'est certainement par beaucoup, dont je suis, à quelques nuances prés (cela dit avec la précaution qui est d'écrire également "ceci n'engageant que moi", car sous prétexte que je manage le blog du Mouvement D'Algérie-Djezaïr, il ne faudrait pas penser que ce se sont toutes les sensibilités, qui ont droit de citer et de s'exprimer au sein de ce Mouvement, qui "penseraient" alors comme moi par les diffusions faites ainsi. Je n'ai pas le profil d'un mentor, ni même d'un gourou. Je tente seulement, fidèle au Texte Fondateur de ce Mouvement, dans les diffusions de ce blog, de laisser parler, sans les censurer, toutes les consciences qui ont donné vie à D'Algérie-Djezaïr, faisant abstraction de mes propres sentiments sur des éclairages valant d'être connus, surtout lorsqu'ils bousculent mes propres vérités. Cela - avant quelque procés en sorcellerie que ce soit - valait d'être écrit de nouveau. Ainsi fait!).
Dans un souci d'éclairage de nos maux mis en mots, je diffuse.
Vous pouvez, bien sûr et comme cela vous est proposé à chaque fois, commenter. La parole libère et elle éclaire la vérité qui ne peut pas être uniforme. A vos plumes donc et faites entendre respectueusement vos différences!
Eric Wagner

PS : en raison du temps imparti de 10 mn, voici la version courte du discours qui a pu être lue.


-Mesdames et Messieurs les Autorités Civiles et Militaires

-Mesdames et Messieurs les Présidents des Associations Patriotiques et du Souvenir Français,

-Mesdames et Messieurs les Porte-drapeaux,

-Mesdames, Messieurs,

-Chers amis, Chers Compatriotes,

 

Le Président, les Membres et les sympathisants de l’Amicale des Pieds-Noirs de Moselle vous souhaitent la bienvenue et vous remercient de bien vouloir vous associer à leur cérémonie de recueillement en mémoire de leurs morts, toutes ethnies et toutes confessions confondues.

Qu’il me soit permis d’abord de saluer le Président d’honneur de notre Amicale, Monsieur Emile Juan. Ses compatriotes et amis lui expriment leur reconnaissance pour son action constante et vigoureuse dans la défense de l’histoire, si calomniée, de nos provinces perdues.

 

Faire entendre la voix d’une communauté que la France refuse d’écouter depuis quarante-huit ans, quand elle ne cherche pas à la faire taire, invite à l’humilité. Pourtant, c’est avec fierté que j’évoquerai ces hommes, ces femmes, fuyant la misère et les persécutions politiques, venus de France et de tout le pourtour de la Méditerranée, parfois d’encore plus loin, chercher en Afrique du Nord un espoir de vie meilleure. Ils ont incarné 132 ans d’une aventure coloniale dont nous refusons de croire qu’elle a été 132 ans d’une totale ignominie. Ils ont transmis à leurs enfants un amour indéfectible pour cette terre qu’ils ont contribué, jusqu’à leur dernier souffle, à mettre en valeur.  Ils ignoraient que leurs descendants repartiraient, un jour, de cette terre tant aimée aussi démunis qu’ils l’étaient en arrivant mais, contrairement à eux, avec le désespoir au cœur. Ils ne remportaient avec eux qu’un seul trésor : la langue et la culture françaises, avec le respect de ses valeurs, que l’école laïque des Troisième et Quatrième Républiques savait encore inculquer à tous ces immigrés et enfants d’immigrés que nous étions tous. C’est ainsi que chaque année, nous apprenions ces vers de Victor Hugo :

 

            Ceux qui pieusement sont morts pour la patrie
            Ont droit qu'à leur cercueil la foule vienne et prie.

 

Ces vers rappelaient le sacrifice de nos aînés tombés au champ d’honneur.   

Pourtant, aujourd’hui, dans l’indifférence générale, les noms qui figuraient sur les monuments de communes, françaises jusqu’en 1962, sont effacés de la mémoire collective, car ces humbles panthéons ont été mutilés, détruits par les nouvelles autorités politiques d’Afrique du Nord. La France, qui n’a rien fait pour les préserver, semble rejeter, comme étrangères, ces pages de son histoire écrites par ceux que l’on continue d’appeler avec un mépris réprobateur des « colons » ou, avec un dédain condescendant, des « Pieds-Noirs », certains allant jusqu’à accoler au terme de « Harkis », le qualificatif infamant de « collaborateurs ».

 

Pire, la France a abandonné au vandalisme, le plus éhonté, les cimetières militaires français, pourtant terres françaises selon le droit international. La nécropole des 1300 marins disparus, le 3 juillet 1940, dans le bombardement des navires français refugiés dans la baie de Mers-El-Kebir, a été entièrement saccagée. Sous la pression des associations d’anciens combattants et de rapatriés, la France a réhabilité les sépultures, mais, selon la volonté du gouvernement algérien, elle a fait disparaître toutes les croix, amputant ainsi ces soldats d’une partie de leur identité.

 

En ce jour de recueillement, les Pieds-Noirs souffrent d’autant plus de ne pouvoir se rendre sur leurs tombes familiales, que ces sépultures, quand elles ne sont pas souillées d’ordures, quand elles ne sont pas brisées et vidées, sont « réduites » selon le délicat euphémisme administratif. Le grand cimetière chrétien d’Oran, a déjà disparu aux deux tiers. Les restes des défunts, rassemblés dans des containers de bétons disposés dans la partie du cimetière encore préservée (mais pour combien de temps encore ?), ne sont identifiés ni par un nom, ni par un signe religieux. Tout cela, sans qu’on ait pris le soin d’en informer les familles. Toujours à Oran, le cimetière juif a disparu sous le béton d’une autoroute.

 

Nos descendants ne retrouveront jamais la trace de leurs ancêtres.

 

Déjà exclus de leur terre natale, les Pieds-Noirs le sont également de l’Histoire de l’une et de l’autre nation. Non contents d’adopter la vision partisane des autorités algériennes sur la présence française en Algérie, les médias hexagonaux réécrivent sous leur dictée notre histoire, et financent des films qui caricaturent notre passé. Qu’une très haute autorité de la République ait pu qualifier de document historique, un film aussi manichéen et outrancier qu’Indigènes, et que son auteur ait pu récidiver, avec des capitaux français, mais sous drapeau algérien, son entreprise de désinformation avec le récent Hors-la-loi, tout cela fait douter de l’information et de la qualité intellectuelle de nos prescripteurs d’opinion. Tout cela conduit, surtout, à s’interroger sur de cyniques calculs spéculant sur le poids de nos votes, et sur l’épuisement de notre combat, au profit d’une grande mais ô combien illusoire politique méditerranéenne.

 

Passeraient ainsi aux profits et pertes de notre Mémoire, ces milliers d’Européens, de Harkis, mais aussi de militaires métropolitains, disparus, sans qu’on en retrouve la moindre trace, du 1er novembre 1954 jusqu’en 1963, longtemps après l’Indépendance, disparitions qui s’intensifièrent dans les mois qui précédèrent et suivirent des Accords d’Evian, jamais respectés par l’Algérie.

Faut-il rappeler les massacres des Harkis ignominieusement abandonnés, sur l’ordre de Paris, à la sauvagerie vengeresse des nouveaux maîtres de l’Algérie ? Faut-il oublier les Européens, de tous âges, égorgés, mutilés, violés et disparus le 5 juillet 1962 à Oran,  jour où l’Algérie célébrait son Indépendance, sans que l’armée française, présente sur place, n’intervienne et sans que la Métropole ne cherche à les retrouver ni à évaluer leur nombre, au moins égal, suivant l’estimation la plus basse, à celui des victimes de la tuerie d’Oradour-sur-Glane ? Pourtant, aucune célébration nationale ne vient rendre hommage à leur mémoire comme on le fait, avec raison, pour cet épisode tragique de la dernière guerre où périrent tant de réfugiés lorrains, natifs de la Moselle.

Quand aujourd’hui, l’opinion publique, et les responsables politiques privilégient le compassionnel, et  affirment l’importance qu’il y a à faire toute la vérité sur des événements traumatiques pour exorciser la souffrance des victimes, seuls les Pieds-Noirs n’ont jamais eu droit à la moindre marque de commisération nationale. Une souscription et le soutien de la municipalité de Perpignan, a permis d’ériger en novembre 2007, un mur sur lequel figurent plus de 2000 noms de disparus, officiellement recensés par le Ministère des Affaires étrangères. Mais des associations, politiquement correctes et se réclamant des Droits de l’Homme, à l’exclusion de ceux des Pieds-Noirs, semble-t-il, promettent la prochaine destruction de ce qu’ils osent qualifier de Mur de la Honte.

A croire que le sobriquet dont on a affublé les Pieds-Noirs implique qu’ils n’ont ni cœur ni mémoire.

Croit-on qu’en étouffant leur parole, la France pourra régler les problèmes qu’elle n’a pas su gérer depuis bientôt un demi-siècle ?

L’Histoire prouve, sur le long terme, que la Vérité finit toujours par s’échapper des cachots où on a voulu la séquestrer et qu’alors elle est cruelle pour ceux qui ont voulu la faire disparaître.

 

C’est pourquoi, l’Amicale des Pieds-Noirs de la Moselle et le Mouvement National des Rapatriés d’AFN et d’Outre-mer, section Moselle et Marly, ainsi que nos frères Harkis, tiennent à vous remercier pour votre présence dont nous voulons croire qu’elle prouve votre refus d’une mémoire hémiplégique qui bouterait hors de l’histoire de France celle des Pieds-Noirs et des harkis.

 

C’est dans cette espérance, qu’avec Victor Hugo, nous pourrons alors dire d’une seule voix :

 

Gloire à notre France éternelle !

Gloire à ceux qui sont morts pour elle !

 

ET j’ajouterai :

Vive la Moselle, vive la République, Vive la France !


La version originale plus longue (qui a donc été écourtée pour pouvoir être lue) et celle-ci:

MÉMORIAL DES FRANÇAIS RAPATRIÉS D’AFN ET D’OUTRE-MER

CIMETIÈRE DE L’EST À METZ (MOSELLE)

CÉRÉMONIE DU SOUVENIR DU 1ER NOVREMBRE 2010 À 10H00

 

Allocution de Madame Danielle Pister-Lopez, Vice-Présidente du Cercle algérianiste, section de Champagne-Lorraine-Grand Est, membre de l’Amicale, Maître de Conférences honoraire à l’Université Paul-Verlaine de Metz.

 

 

-Mesdames et Messieurs les Autorités Civiles et Militaires

-Mesdames et Messieurs les Présidents des Associations Patriotiques et du Souvenir Français,

-Mesdames et Messieurs les Porte-drapeaux,

-Mesdames, Messieurs,

-Chers amis, Chers Compatriotes,

 

Le Président, les Membres et les sympathisants de l’Amicale des Pieds-Noirs de Moselle vous souhaitent la bienvenue et vous remercient de bien vouloir vous associer à leur cérémonie de deuil et de recueillement en mémoire de leurs morts, de toutes ethnies et de toutes confessions.

Qu’il me soit permis d’enfreindre quelque peu les règles protocolaires pour adresser d’abord un salut particulier au Président d’honneur de notre Amicale des Pieds-Noirs de Moselle, Monsieur Emile Juan, ici présent, qui, jusqu’alors, vous accueillait et parlait en notre nom à tous. Je voudrais rendre hommage ici à son action constante et vigoureuse pour défendre l’histoire de nos provinces perdues et la mémoire d’un peuple qui, le plus souvent aujourd’hui, est salie par les calomnies des idéologues et par celles des ennemis de la France, quand elle n’est pas tout simplement occultée dans le récit de notre histoire nationale. Que notre Président trouve ici l’expression de la reconnaissance de tous ses compatriotes et amis.

 

C’est avec humilité et fierté que j’ai accepté de prendre la parole en ce jour de recueillement.

- Humilité, car je mesure la difficulté qu’il y a à faire entendre la voix et la souffrance d’une communauté que, depuis quarante-huit ans, la France refuse d’écouter, quand elle ne cherche pas à la faire taire.

- Fierté, car à travers nos histoires personnelles et familiales, nous avons conscience d’incarner 132 ans d’une aventure coloniale dont nous refusons de croire qu’elle a été 132 ans d’une totale ignominie. Des hommes, des femmes ont quitté leurs pays d’origine, venus de France mais aussi de tout le pourtour de la Méditerranée et, parfois, d’encore plus loin comme de la Pologne humiliée et démembrée en 1830. Ils arrivaient en Afrique du Nord, chassés par la misère, les persécutions politiques, munis d’un simple baluchon, n’ayant que la force de leurs bras à offrir, mais animés d’une volonté farouche de s’en sortir. Pour la plupart d’entre eux, ils n’ont pu transmettre à leurs enfants qu’un amour indéfectible pour cette terre qu’ils ont contribué, jusqu’à leur dernier souffle, à mettre en valeur ; ils leur ont légué, pour seul héritage, une admiration sans borne pour cette France devenue leur nouvelle patrie. Ces malheureux n’imaginaient pas que, dans leur grande majorité, leurs descendants repartiraient, un jour, de cette terre tant aimée avec un simple baluchon, semblable à celui apporté autrefois par leurs ancêtres. Mais ces derniers arrivaient porteurs d’espérance alors que nous-mêmes sommes partis, remplis de désespoir. Nous emportions avec nous, cependant, un butin de guerre : la langue et la culture françaises. J’ajouterai à cette formule, que j’emprunte à  Kateb Yacine, écrivain algérien nationaliste, l’amour de la France, que l’école laïque et républicaine savait encore inculquer à tous ces immigrés et enfants d’immigrés que nous étions tous.

 

C’est justement un souvenir d’école communale qui remonte à ma mémoire en ce jour de commémoration des Morts :

 

Ceux qui pieusement sont morts pour la patrie
Ont droit qu'à leur cercueil la foule vienne et prie.

 

Les enfants de l’Ecole publique de la Troisième et de la Quatrième Républiques ont tous appris par cœur ces vers de Victor Hugo. Ils enseignaient aux écoliers le sens du sacrifice de leurs aînés tombés au champ d’honneur et ils leur rappelaient le devoir qui leur était fait de ne jamais oublier les noms inscrits sur les Monuments aux Morts érigés sur tout le territoire français.

Pourtant, aujourd’hui, où de nombreuses cérémonies semblables à la nôtre se déroulent en France, on tolère, dans l’indifférence générale, que sur ces humbles panthéons communaux des centaines de noms soient absents. Ces noms figuraient sur les monuments des communes qui s’enorgueillissaient, jusqu’en 1962, d’être françaises à part entière. À l’initiative de quelques élus métropolitains, aussi généreux que courageux, un nombre infime de ces monuments ont été ramenés en France, tous les autres ont été mutilés ou détruits par les nouvelles autorités politiques des pays d’Afrique du Nord, qui considéraient qu’ils n’appartenaient pas à leur histoire.

De façon bien plus incompréhensible, et totalement injustifiée, la France semble rejeter, comme étrangères, ces pages de son histoire écrites par ceux que l’on continue d’appeler avec un mépris réprobateur des « colons » ou, avec un dédain condescendant, des « Pieds-Noirs », certains allant jusqu’à accoler au terme de « Harkis », le qualificatif infamant de « collabos ». L’administration s’obstine, souvent, à nous infliger l’humiliation de la preuve à fournir de notre nationalité, y compris pour les fonctionnaires de l’Etat, comme s’ils n’étaient pas des Français tout court, nés dans des départements français, jouissant des mêmes droits que les autres nationaux. Même si, pour la plupart d’entre nous, nous avons toujours rempli au maximum nos devoirs de citoyens. C’était sans doute pour nous, une façon de justifier le reproche qu’on nous fait souvent d’être excessifs.

 

Comment comprendre qu’aucun gouvernement n’ait jamais fait la moindre recension des noms de ces combattants afin qu’ils retrouvent une visibilité à laquelle ces hommes tombés, loin de leur terre natale, sur les champs de bataille où la France a défendu sa liberté et les valeurs de sa civilisation, ont naturellement droit ?

 

Comment accepter que la France abandonne à la destruction, qui n’est pas seulement celle du temps, les cimetières où reposent, en terre devenue étrangère, des militaires français ? Selon le droit international, ces cimetières, zones extraterritoriales, appartiennent à la nation dont ces soldats, tués au combat, sont les ressortissants. Pourtant les pouvoirs ont laissé saccager, près d’Oran, la nécropole où sont ensevelis les 1300 marins disparus le 3 juillet 1940 lors de l’attaque menée contre les navires français réfugiés dans la baie de Mers-El-Kébir. Il a fallu la pression de toutes les associations d’anciens combattants et de celles de rapatriés pour que l’on procède à une réfection des lieux. Mais, selon la volonté du gouvernement algérien, la France a fait disparaître toute croix, amputant ainsi ces soldats d’une partie de leur identité.

 

Comment, en ce jour de recueillement, les Pieds-Noirs ne ressentiraient-ils pas douloureusement l’impossibilité où ils sont de ne pas pouvoir se rendre sur leurs tombes familiales ? Pas seulement à cause de leur éloignement, pas seulement parce que l’âge venant, ils ne pourraient plus se déplacer comme ils le voudraient. Mais parce que les cimetières d’outre-Méditerranée où reposaient leurs proches, disparaissent par une volonté conjointe des deux Etats. Quand les monuments funéraires ne sont pas souillés d’ordures, quand ils ne sont pas brisés et vidés, ils sont « réduits » selon le délicat euphémisme administratif. C’est ainsi qu’à Oran, ville essentiellement européenne jusqu’en 1962, les deux tiers du cimetière chrétien ont été récemment récupérés par les autorités algériennes. Les restes des défunts, ont été rassemblés dans des containers de bétons disposés dans la partie du cimetière encore préservée (mais pour combien de temps encore ?), containers sur lesquels ne figurent aucun nom, aucun signe religieux. Et tout cela, sans qu’on ait pris le soin d’en informer correctement les familles. Toujours à Oran, l’ancien cimetière juif a disparu sous le béton d’une autoroute. Nos descendants ne retrouveront jamais la trace de leurs ancêtres.

 

Comment ne pas voir, ici, une volonté délibérée d’effacer de la mémoire collective jusqu’au souvenir du passage des Européens dans ce pays qu’ils ont tant aimé. Déjà exclus de leur terre natale, ils le sont également de l’Histoire de l’une et de l’autre nation. Les médias hexagonaux, non contents d’adopter la vision partisane des autorités algériennes sur la présence française en Algérie, réécrivent sous leur dictée notre histoire nationale, et financent les films qui caricaturent notre passé. Qu’une très haute autorité de la République ait pu qualifier de document historique un film aussi manichéen et outrancier qu’Indigènes, que l’auteur de ce film récidive, avec l’argent de la France mais sous drapeau algérien, dans une totale désinformation avec Hors-la-loi, monopolisant tous les prime times à la télévision et les unes des journaux, sous prétexte de rétablir la vérité historique ; que, devant les mises au point d’historiens sérieux, il défende sans vergogne et avec le soutien d’une majorité de media la liberté de création, tout cela fait douter de la qualité intellectuelle de nos prescripteurs d’opinion. Tout cela conduit, surtout, à s’interroger sur la possibilité de cyniques calculs politiques sur le poids de nos votes, sur la probabilité d’une proche disparition de notre combat, au profit d’une illusoire grande politique méditerranéenne.

 

Passeraient ainsi aux profits et pertes de notre histoire, ces milliers d’Européens, de Harkis, mais aussi de militaires français, disparus, sans qu’on en retrouve la moindre trace, depuis le 1er novembre 1954 jusqu’à 1963, voire 1964, longtemps après l’Indépendance. Disparitions qui s’intensifièrent dans les derniers mois qui ont précédé et suivi des Accords d’Evian jamais appliqués par l’Algérie. On en veut pour preuve les massacres des Harkis ignominieusement abandonnés, sur l’ordre de Paris, à la sauvagerie vengeresse des nouveaux maîtres de l’Algérie. Les Européens, de tous âges, ont payé un lourd tribut, le 5 juillet 1962 à Oran : en ce jour où l’Algérie célébrait son Indépendance, plusieurs centaines de malheureux, -un nombre toujours ignoré quarante-huit ans après- ont été égorgés, mutilés, violés ou ont disparu sans que l’armée française, présente sur place, n’intervienne et sans que la Métropole ne s’inquiète de leur sort, l’Algérie se chargeant d’entraver les enquêtes de la Croix-Rouge internationale. Les historiens s’accordent pour comparer cette tuerie à celle d’Oradour-sur-Glane, suivant l’estimation la plus basse. Pourtant aucune célébration nationale ne vient rendre hommage à leur mémoire comme on le fait, avec raison, pour cet épisode tragique de la dernière guerre où périrent tant de réfugiés lorrains natifs de la Moselle.

Alors que la tendance actuelle de l’opinion publique, comme des responsables politiques, est de mettre en avant le compassionnel ; alors que l’on proclame l’importance qu’il y a à faire toute la vérité sur des événements traumatiques afin de les surmonter ; alors que l’on insiste sur l’utilité des lieux de mémoire pour exorciser la souffrance des victimes, de toutes les victimes, sans distinction d’origine, seuls les Pieds-Noirs n’ont jamais eu droit à la moindre marque de commisération nationale. Depuis quarante-huit ans, on refuse d’entendre leurs demandes pour retrouver la trace de leurs proches. Depuis quarante-huit ans, on leur refuse le droit d’avoir un lieu de recueillement où se rendrait le chef de l’Etat, incarnation d’une Nation qui reconnaîtrait la souffrance d’une partie des siens, comme cela se fait depuis peu à Maillet, autre commune française martyre. Malgré les obstacles administratifs, malgré les tombereaux d’injures et de mensonges reçues de diverses associations de défense des Droits de l’Homme- à l’exclusion, notons-le, des Droits des Français d’Algérie-, les Rapatriés ont pu ériger en novembre 2007, grâce à une souscription et au soutien de la municipalité de Perpignan qui a prêté un lieu à cet effet, un mur sur lequel figurent plus de 2000 noms sur les 3192 disparus officiellement de novembre 1954 à décembre 1962, tels qu’ils ont été recensés par le Ministère des Affaires étrangères. Mais depuis trois ans, les opposants à cette réalisation ne cessent de remettre en cause l’existence de ce Mur qu’ils osent qualifier de Mur de la Honte. Pourtant, quand on a vu, comme je les ai vus moi-même, les proches de ces disparus chercher en tremblant un nom sur ce Mur, tendre avec ferveur le bras en direction de celui de l’être aimé et le toucher de la main, comme pour renouer un lien brisé depuis si longtemps, -ils ont tous spontanément le même geste-, quand on entend une femme de quatre-vingt onze ans dire qu’elle espère toujours le retour de son époux disparu le 5 juillet 1962, on se sent pris autant par l’émotion que par la rage, devant l’inhumanité du traitement infligé à ces malheureux par des autorités aveuglées par de petits intérêts politiques immédiats.

 

A quelle sorte d’humanité, appartiennent donc ces Pieds-Noirs pour que la Nation leur refuse, depuis quarante-huit ans, la moindre marque de compassion ? Pensent-elle que le sobriquet de Pieds-Noirs dont on les a affublés implique qu’ils sont réduits à cette seule partie de leur corps et qu’ils n’ont ni cœur ni mémoire ? Croit-elle qu’en étouffant leur parole, elle va régler les problèmes qu’elle n’a pas su gérer depuis bientôt un demi-siècle ? L’Histoire prouve, dans sa longue durée, que la vérité finit toujours par s’échapper des cachots où on a voulu la séquestrer et qu’alors elle est cruelle pour ceux qui ont voulu la faire disparaître.

 

Deux raisons d’espérer cependant : cette année, à l’initiative du Président de la République, qui a voulu les reconnaître comme Morts pour la France, les noms des victimes de la fusillade de la rue d’Isly, tombés à Alger le 26 mars 1962, sous des balles tirées, sans sommation, par l’armée française sur des femmes, des enfants, des adolescents, des hommes sans armes, venus simplement dire leur volonté de rester Français, ces noms défilent grâce à des moyens électroniques sur la colonne du monument du Quai Branly à Paris.

La seconde vient d’Algérie, pas de la part des représentants d’un pouvoir qui ne peut se maintenir à Alger que par la corruption et l’arbitraire, mais grâce à l’initiative de responsables Oranais de la Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l'Homme, qui voudraient lancer une campagne d’appel à témoins sur la tragédie du 5 juillet 1962. Peut-être que la parole d’Algériens, nés après 1962, sera-t-elle plus crédible que celle des témoins directs que nous sommes.

 

Victor Hugo rappelant les Révolutions du passé qui ont divisé les Anglais et leur ont fait décapiter leur roi Charles Ier, plus d’un siècle avant que les Français, tout aussi divisés, ne guillotinent Louis XVI, affirmait avec force :

 

« Quelle que puisse être la diversité des opinions sur ces morts fatales des Charles Ier et des Louis XVI, on doit savoir que de semblables pages ne s’effacent pas de l’histoire des empires ; elles restent, et l’on doit trouver bon qu’elles restent, de quelque façon qu’on les considère, soit qu’on y voie une leçon pour les peuples, soit qu’on y voie une leçon pour les rois. »

 

C’est pourquoi, l’Amicale des Pieds-Noirs de la Moselle et le Mouvement National des Rapatriés d’AFN et d’Outre-mer, section Moselle et Marly, ainsi que nos frères Harkis, tiennent à vous remercier pour votre présence dont nous voulons croire qu’elle prouve votre volonté de ne pas céder à l’illusion d’une mémoire hémiplégique qui bouterait hors de l’histoire de France celle des Pieds-Noirs et des harkis.

 

C’est dans cette espérance, qu’avec Victor Hugo, nous pourrons alors dire d’une seule voix :

 

Gloire à notre France éternelle !

Gloire à ceux qui sont morts pour elle !

 

 

Danielle PISTER-LOPEZ


 

Wagner le 03.11.10 à 06:35 dans u/ Nous avons reçu un message. - Lu 1256 fois - Version imprimable
Article précédent - Commenter - Article suivant -

Commentaires

Merci à Danielle

Merci à Danielle elle a tout dit ce texte magnifique est une référence   Jean-François Paya cercle Algérianiste du Poitou

Jean-François PAYA - 05.12.10 à 22:52 - # - Répondre -

Commenter l'article

Un mouvement de coeur et d'opinion

Mouvement de cœur et d’opinion, il fonctionne, compte tenu de son expansion, principalement grâce à Internet : Site, groupes de discussion et d’action. Cependant et afin de favoriser les contacts vivants, lorsque l’implantation géographique de ses "adhérents" le permet, des sous-groupes géographiques se constituent.

Deux axes de travail

Réflexions : compte tenu du mode de fonctionnement de notre Mouvement, et l’éparpillement de ses "adhérents", c’est l’axe principal. Actions : Elles couronnent les réflexions, sous différentes formes : rencontres, pétitions, initiatives diverses…
Modes opérationnels : Les "adhérents" proposent et rejoignent les groupes de leur choix (géographiques : pays, régions, et/ou thématiques). Chaque type de réflexion ou d’action génère son sous-groupe via le Net (mails, groupes Yahoo, supports divers). / Réseau de sites de signataires webmestres. / Les résultats de chaque groupe sont soumis à l'appréciation de l'ensemble des "adhérents".