Proposer une devise
"Il faut mettre ses principes dans les grandes choses, aux petites la miséricorde suffit." Albert Camus// "La vérité jaillira de l'apparente injustice." Albert Camus - la peste// "J'appelle à des Andalousies toujours recommencées, dont nous portons en nous à la fois les décombres amoncelés et l'intarissable espérance." Jacques Berque// « Mais quand on parle au peuple dans sa langue, il ouvre grand les oreilles. On parle de l'arabe, on parle du français, mais on oublie l'essentiel, ce qu'on appelle le berbère. Terme faux, venimeux même qui vient du mot 'barbare'. Pourquoi ne pas appeler les choses par leur nom? ne pas parler du 'Tamazirt', la langue, et d''Amazir', ce mot qui représente à la fois le lopin de terre, le pays et l'homme libre ? » Kateb Yacine// "le français est notre butin de guerre" Kateb Yacine.// "Primum non nocere" (d'abord ne pas nuire) Serment d'Hippocrate// " Rerum cognoscere causas" (heureux celui qui peut pénétrer le fond des choses) Virgile.// "Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde" Albert Camus.Sommaire
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D'Algérie-Djezaïr
Le MOUVEMENT D’Algérie-Djezaïr vient d’être officialisé par plus d’une centaine de membres fondateurs résidant dans le monde entier, ce 22 juin 2008 à Saint Denis (Paris - France). Il est ouvert à toutes celles et ceux qui voudront le rejoindre, natifs d'Algérie, et leurs descendants.ORGANISATION
Elle est démocratique, c'est-à-dire horizontale, sans centralisme, et sans direction. Les décisions essentielles doivent être conformes à l’esprit du Texte Fondateur. Elles sont prises après larges consultations, où tous les membres donnent leurs opinions. Les règles internes sont arrêtées par les "adhérents". Pas de cotisations. Les groupes et le Mouvement trouvent les moyens de faire aboutir leurs actions.Peter Von Matt au sujet de B Sansal
PRIX DE LA PAIX
des editeurs et libraires allemands 2011
Eloge de Boualem Sansal de
Peter von Matt
Eglise Saint-Paul - Francfort-sur-le-Main
16 octobre2011
- Seul le texte prononce fait foi -
La litterature est d'une lente virulence. On ne devrait pas s'apitoyer sur les ecri-vains qui se plaignent d'absence d'effectivite. Les livres sont des creatures autono-mes. Les effets qu'ils provoquent dans le monde entier sont incommensurables, et leurs auteurs, apres coup, n'ont plus rien ä dire. Nombreuses sont les oeuvres qui sommeillent des annees dans un coin avant de penetrer l'esprit et le cceur d'un sie-cle. D'autres explosent puis disparaissent l'espace d'une seconde etincelante. Mais, applique au livre politique, le principe d'Heinrich von Kleist fait foi : „Le livre est l'une des choses qui lentement pourrait detruire l'obstination du temps qui l'emprisonne, teile une racine qui detruit un rocher ; non par explosion." Cette phrase est d'autant plus remarquable que Kleist lui-meme aurait assurement prefere agir par explosion.
La litterature est d'une lente virulence, aucun rocher ne saurait lui resister ä long terme. C'est qu'elle est en pleine possession de ses moyens. Detruire l'obstination du monde suppose un art et non seulement une bonne volonte. Force est ainsi de cons-tater que l'homme auquel nous rendons hommage aujourd'hui est autant artiste qu'esprit politique. C'est un conteur indomptable, un auteur satirique prestigieux, plaisantin et sage, implacable dans les constats des maux, juge sans pitie face ä la cupidite des puissants et toujours empreint de compassion quant au destin des peti-tes gens de son pays, l'Algerie. II aime ce pays autant qu'il a aime sä mere qui
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connut un Islam humain marque de piete naturelle et perpetration minutieuse des rites et prieres. Maints sont les personnages de mere dans l'oeuvre de Sansal et el-les sont toutes legerement symboliques. Ces meres pleines de miseres et faibles espoirs refletent le pays meurtri, et dans la detresse des fils face ä ces meres souf-frantes, on retrouve aussi la detresse du citoyen Boualem Sansal face ä l'etat de son pays. Cela sonne banal et pourrait l'etre si Sansal n'etait un auteur magnifique. Son realisme acharne des details nous force ä mettre le nez dans la realite quotidienne de l'Algerie d'aujourd'hui. II mobilise les cinq sens - cela empeste, piaille, eblouit, brüle la peau et picote sur la langue. La lecture peut meme, l'espace d'un instant, empecher de discerner l'ombre de ce dont il s'agit reellement derriere ce tumulte : le pouvoir, la violence, la cruaute et l'amour. La narration de Sansal vibre de tension entre le petit ou le plus petit, vu au microscope, et les arcs de la structure symboli-que. Seul cet art de compositeur, du reste, lui permet de parier politique dans son ensemble.
Boualem Sansal aime son pays qu'il aurait sinon quitte depuis iongtemps ä la ma-niere des nombreux jeunes gens de son ceuvre qui tournent le dos ä leur mere et fuient par la mer. On leur donne meme un nom : Harraga. Ce mot plane sur la cöte du Maghreb tel un inquietant fanal. Les Harraga veulent s'en aller, passer en Europe meme s'il faut pour cela echanger une misere contre une autre. Ils sont jeunes. Ils veulent travailler. Ils veulent faire quelque chose de presentable dans leur vie. Et ils n'ont aucune Chance. Ce que la premiere phrase de la declaration d'independance americaine a inscrit jadis comme droit fondamental, the pursuit of happiness, la re-cherche du bonheur bäti de ses propres mains, leur est refusee. Sansal parle de ce desarroi lorsqu'il ecrit sur son pays. „Harraga" est le titre de son roman le plus sai-sissant.
L'Algerie pourtant est un pays riche, tres riche. Elle a des reserves de petrole et de gaz pour des decennies et en exporte en enorme quantite. Tout le monde pourrait en profiter. L'etat des choses pourrait etre tel que toute personne entreprenante qui a su garder l'envie naturelle d'apprendre et de travailler, puisse reussir dans quelque do-maine que ce soit et dire un jour ä ses enfants : „Voyez, c'est ainsi que j'ai construit mon bonheur, de mes propres mains, et vous aussi pouvez en profiter et continuer."
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Dans quel endroit, sinon lä oü petrole et gaz coulent ä flöts, comme le lait ou le miel
au pays de la terre promise, pourrait se developper une economie diversifiee fondee
sur des infrastructures solides et dans laquelle chacun trouverait un creneau pour y
developper son talent ? Mais lä oü il y a du petrole, il y a des vautours. Les 60 mil-
liards de dollars americains que l'exportation energetique rapportent chaque annee ä
l'Algerie tombent dans de nombreuses mains ouvertes. De qui s'agit-il exactement ?
Meme les experts les plus experimentes ne peuvent que faire des suppositions. L'ar-
gent rend discret. Et l'Etat sait comment garder la discretion sous forme de censure
ou contröle de l'opinion publique. Au contraire des dictatures de despotes plus ou
moins pittoresques qui ont marque jusqu'ä recemment le monde arabe, l'Algerie est
une republique presidentielle ä la structure exterieure clairement definie. Le President
est elu tous les cinq ans par la population, et les elections ne sont aucunement une
simple farce. Se faire toutefois une image reelle des rapports de force tiendrait plutöt
d'une marche dans le brouillard. C'est ce qui apparait lorsque l'on ecoute les experts.
Plus ils en savent et le fönt savoir, plus l'ensemble prend des formes impenetrables.
II existe des centres incontestes du pouvoir comme le gouvernement officiel, l'armee,
les Services secrets, les organisations industrielles, les mouvements islamistes et
une mafia heteroclite. Mais les agissements de ces centres de pouvoirs entre eux,
leur degre d'animosite ou les reseaux d'interconnexion, voire tout en meme temps,
savoir qui lave les mains de qui et quand ils se bondissent dessus, personne ne
semble le savoir exactement. Meme pour des gens les plus intimes du regime, l'iden-
tite politique de l'Algerie reste un mystere. Le general de brigade Mohamed Touati,
conseiller pour la securite du president Bouteflika, ecrivit il y a quelques annees,
d'une surprenante sincerite : „Le regime n'est ni dictatorial, ni democratique, ni presi-
dentiel, ni parlementaire ... Nous ne vivons pas sous une monarchie mais vivons-
nous pour autant en democratie ?" La question en elle-meme est un point d'interro-
gation.
Les groupes de pouvoir sont concurrents dans un equilibre precaire, et l'argent semble suffire ä tous. II n'existe aucun concept en sciences politiques pour un tel Systeme. Mais si l'on songe aux recentes revolutions dans le monde arabe et ä ce qu'il pourrait advenir d'elles, ce terme manquant pourrait bien naTtre. Le fait est qu'en
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1988 s'est produit en Algerie le meme type de revolution qu'ont connu la Tunisie et l'Egypte. II s'en suivit ä l'epoque trois annees pleines d'espoir. Puis une guerre civile barbare a eclate. Elle a dure sept ans et fait deux cent mille morts, la plupart parmi la population civile. Le Systeme d'aujourd'hui s'est constitue ä la fin du carnage. II pour-rait en etre de meme ailleurs.
Dans l'ecriture de Boualem Sansal, le regard sur le monde microscopique est en parallele avec la perspective historique. Vu qu'il aime son pays, son histoire y est omnipresente. Elle fait partie de lui et transparait ä part entiere dans ses ecrits. Elle se manifeste dans chaque phrase. Ses personnages sont des representants d'eve-nements historiques et par lä-meme des gens bien distinguables. Un exemple tire de son dernier roman qui n'a pas encore ete traduit, „Rue Darwin", le röle imposant que prend la grand-mere, une chef d'entreprise de haut vol, maquerelle du plus florissant bordel du pays, chef d'un clan qui remonte au plus profond du passe mais qui se propage dans le monde entier sous le fait de la mondialisation economique d'aujour-d'hui. C'est un personnage que l'on pourrait trouver chez Fellini, ä la difference que cette femme ne vit ni ne domine pas dans un monde imaginaire, mais bien dans cette Algerie ä la si terrible histoire vivement observee.
Si terrible histoire - il existe peu d'Etats dans la peripherie de l'Europe qui ont connu une deuxieme moitie du 20eme siecle aussi sanglante. Le 8 mal 1945 dejä, jour oü notre continent respirait, i'Algerie a subi un massacre qui fit des milliers de victi-mes. La tuerie ne s'est jamais vraiment arretee depuis. Toujours pas. Le nom donne ä ces conflits depend de ceux qui detiennent le monopole d'interpretation : guerre de liberation, rebellion, coup d'etat, guerre de religion, terreur... Ä Boumerdes, ville oü habite Sansal, huit attentats ayant entraTne morts et blesses ont ete commis dans le seul mois de juillet de cette annee. L'auteur lui-meme a protege sä maison de fils de fer barbeles : il ne sort pas le soir et ne se deplace jamais dans l'arriere-pays. Que fait-il alors ? II ecrit. II raconte. II raconte sä vie meme s'il la risque en le faisant.
Dans son premier livre, „Le serment des barbares", on percoit encore que c'etait une rupture de digue. Le discours narratif se repand en larges flüts dans toutes les directions et depasse les limites d'une histoire policiere. L'auteur reprend toujours et encore son accusation contre la misere du pays. II s'attaque aux profiteurs de la re-
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volution, se moque de l'incapacite des notables honores qui ne savent installer ne serait-ce qu'un reseau d'eau potable pour la population. II glorifie encore le vieux temps oü juifs et chretiens, musulmans et athes, berberes et arabes vivaient en paix, oü la foi etait encore une experience propre aux esprits penseurs et non le diktat de noyaux de commando. C'est un pave peu maniable que ce premier livre, l'eruption d'un ecrivain autodecouvert. C'est pourtant ce livre qui a ouvert la voie ä des romans minces, proportionnes qui ont rapidement vu le jour par la suite. Parmi eux, un livre a modifie la connaissance historique et ce non seulement au Maghreb, un livre echt sur la base de documents concernant un officier SS qui se metamorphose en resis-tant algerien et cache de cette maniere sä responsabilite dans la shoah.
Sansal habite en Algerie et pourtant, ses livres qui traitent si passionnement de l'Algerie n'ont pas le droit d'y paraTtre. Ils y entrent par trafic, circulent sous le man-teau. Lui-meme n'est membre d'aucun parti, ni mouvement. II est la voix isolee qui fait confiance ä la lente virulence de la litterature. II ne croit pas ä un changement par explosion, mais bien ä la force perseverante de la racine qui detruit le rocher. N'est-ce pas un leurre, une grande Illusion vu les rapports de force existants ? Cela se pourrait, mais celui qui parle ainsi, s'est resigne. Celui qui parle ainsi seconde ceux qui se partagent le pouvoir et l'argent. Se resigner n'est pas seulement renoncer ä agir mais agir de fa?on particuliere et destructrice. C'est ce que refuse Sansal en ecrivant et entrant ainsi en communication avec ses compatriotes. Son manifeste de 2006, „Poste restante : Alger, lettre de colere et d'espoir ä mes compatriotes", com-mence par une phrase dont la force explosive n'est pas perceptible de suite : „Mes chers compatriotes. Au fond, jamais nous n'avons eu l'occasion de nous parier, je veux dire entre nous, les Algeriens, librement, serieusement, avec methode, sans a priori, face ä face, autour d'une table, d'un verre." Cela sonne debonnaire mais c'est un acte revolutionnaire. Cette phrase parle de la liberte de parole, base de toutes les autres libertes. Elle parle de conversations privees, evenements dynamiques d'oü seule la verite peut jaillir - la verite non comme commandement mais comme resul-tat d'un echange, d'un dialogue, d'une argumentation raisonnee. Cette verite est
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souple ; eile se reforme ä chaque fois de nouveau. Lessing a ete jadis le premier ä le dire, on l'a d'ailleurs assez souvent oublie en Allemagne. La oü la verite, creation commune entre esprits libres, peut se former et se reformer dans des debats publics, lä seulement il peut y avoir la paix. La guerre commence par la verite imposee, bien avant le premier coup de feu. Par sä resistance irrespectueuse envers les doctrines, ses prises de position crues, sä colere, ses railleries et sä douieur, Boualem Sansal fait avancer le debat public des esprits libres. Celui qui aime la paix se doit de lui etre reconnaissant.
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Wagner
le 08.11.11 à 12:38
dans d/ Nos écrivains célèbres.
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